Autant Audiard s’interrogeait sur le besoin, chez les marins, de faire des phrases, autant on peut s’interroger sur le besoin, chez le psalmiste, de toujours crier vers Dieu. N’est-ce pas là, pourtant, une attitude juste et bonne ? Quand les soucis nous accablent, il est assez facile de penser à Dieu, mais le bonheur peut nous égarer loin de lui, comme le signale une formule de bénédiction nuptiale. De plus, entre la très ancienne envie d’être « comme des dieux », qui date du péché originel, et notre liberté chérie, beaucoup plus récente, on a du mal, surtout dans le monde d’aujourd’hui, à accorder une place à Dieu dans notre vie.

On pense pouvoir tout faire sans lui et, d’ailleurs, comme on ne le voit pas, il est facile de le snober. Mais rien de tel chez le psalmiste : toi vers qui je crie tout le jour. Voilà bien l’attitude de l’ami véritable de Dieu. Il s’agit d’accorder au Seigneur la place légitime qui lui revient : Jésus, Fils de Dieu, sauveur, pitié pour moi, pécheur (prière du pèlerin russe). Ce n’est pas se diminuer que tout attendre de Dieu, c’est juste avoir du bon sens, parce que tout vient de lui, d’une façon ou d’une autre, et, en vérité, on ne peut nier que, sans Dieu, notre vie soit pauvre et malheureuse. Passer du temps en prière chaque jour, ce n’est pas une attitude humiliante, parce qu’il s’agit, avant tout, d’élever son âme vers le Seigneur. C’est au contact du maître que le disciple apprend à discerner ce qui est bon, ce qu’il convient de faire, et qu’il apprend de lui la bonté, la douceur, la miséricorde et l’écoute. Ne fallait-il pas crier vers Dieu et implorer sa pitié, afin d’être comblés de joie, non par nos mérites personnels, mais par la grâce de Dieu qui surpasse toute chose ?

Ne nous lassons pas d’implorer les bontés du Seigneur :  il est là qui nous écoute et nous exauce.

  Abbé Fabrice Chatelain
  Revue Parole et Prière